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Isabelle Huppert, à l’affiche dans « La Prisonnière de Bordeaux » : « J’ai parfois l’impression que le cinéma devient une forme d’archéologie »

On croit bien connaître Isabelle Huppert, grande actrice moderne qui se méfie des émotions faciles et ouvre à l’écran des abîmes d’ambiguïté et autant de brèches dans l’étude des comportements humains. Et voilà qu’elle nous prend une nouvelle fois par surprise avec La Prisonnière de Bordeaux, sa deuxième collaboration avec la cinéaste Patricia Mazuy après le mémorable Saint-Cyr (2000), où elle façonne une héroïne multifacettes : femme de prisonnier captive de sa grande maison bourgeoise où elle recueille une semblable issue des quartiers populaires. En tête-à-tête avec la non moins éblouissante Hafsia Herzi, Huppert déroule une gamme sautillante et faussement primesautière qui déploie son espace de jeu. Peu avare en actualités, la comédienne, présidente de la 81e Mostra de Venise, qui s’ouvre mercredi 28 août, est attendue pour recevoir le prix Lumière lors du festival éponyme qui se tiendra en octobre à Lyon.
Au départ, le film vient d’une idée des scénaristes. Patricia Mazuy a rejoint ensuite Pierre Courrège et François Bégaudeau dans le processus d’écriture. Allons directement au but : c’est un film sur la lutte des classes. Elle s’incarne ici, comme souvent, dans la rencontre et le tête-à-tête de deux femmes qui viennent de deux milieux différents. Le genre de postulat improbable qu’on a du mal à avaler, mais là, on y croyait, et très fort, parce que ces femmes de prisonniers, elles se rencontrent au parloir, un lieu de grand brassage social qui instaure entre elles une certaine égalité. C’est la très bonne idée du scénario.
Pas pendant la fabrication du film en tout cas, mais après, oui, on m’a beaucoup parlé de Chabrol. Peut-être qu’on retrouve cette même distance ironique qu’instillait Chabrol vis-à-vis du drame. Il y a ça aussi chez Michael Haneke et même chez tous les grands cinéastes : ce petit pas de côté qui, sans s’appesantir, fait voir les choses sous un autre angle, avec un certain détachement, voire une pointe d’humour. C’est peut-être ça que le film a en commun avec La Cérémonie : c’est drôle et cruel en même temps. On appelle ça le mordant.
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